PLAT VERSO : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or » écrivait Baudelaire pour défendre « Les fleurs du mal ». Je ne sais si la boue de l’adultère a cette vertu philosophale. Elle est une boue si particulière qu’elle déjoue toutes les pensées. En réalité, la chimie du désamour qui préside à l’adultère est une alchimie mortifère. Elle contraint la victime au chemin de croix et aux supplices d’une âme humiliée. Je ne me pense « ni sage et doux comme un maudit » ni « parfait chimiste »[1]. Quand s’effondre, avec tant de laideur et de mépris, un amour qu’on croyait indestructible, il est presque impensable de trouver l’antidote au poison du désamour : la souffrance, la honte, la rancœur, le déshonneur, l’immense chagrin, tout participe du sentiment d’être condamné et injustement violenté, sidéré, déchiqueté, en mille morceaux. Grâce aux ami(e)s, à leur estime fidèle, aux âmes sœurs et à ma Muse Magicienne, j’ai trouvé la force de me relever... Même sur ces ruines-là et après tant de meurtrissures, j’avais le droit de « revenir à la vie » : c’est l’étymologie de reviviscence... Je m’y suis autorisé et j’ai recherché une énergie nouvelle pour écrire et d’écrire ces déchirures de l’âme et du corps qu’inflige l’adultère. Pour chaque poème de la déchirure, en contrepoint, et pour redonner aux ténèbres une part de lumière, j’ai choisi de composer un texte d’espoir, de résurrection... Avec une « subjectivité impliquée, impliquée par l’objectivité attendue »[2], il me fallait dévoiler lucidement ce que fait subir ce trauma. Ici, l’objectivitéattendue n’a pas de prétention épistémologique, elle tente seulement d’être poétique. C’est une mise en perspective et une autopsie cathartique de toute cette boue de l’adultère... d’où, avec distance, amour et résilience, renaissent joyeusement de nouvelles fleurs de vie. J’ai réalisé toutes les peintures pendant cette période d’écriture et de résurrection. [1] Charles Baudelaire, « Ébauche d’un épilogue pour la deuxième édition des Fleurs du Mal » (1861) [2] P. Ricœur, Histoire et Vérité, Éd. du Seuil. 1955, pp. 23-24.